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Sexisme au travail : état des lieux des violences sexistes dans le monde professionnel

« Près d’une Française sur trois a déjà été harcelée ou agressée sexuellement sur son lieu de travail au sens juridique…

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« Près d’une Française sur trois a déjà été harcelée ou agressée sexuellement sur son lieu de travail au sens juridique du terme » (Observatoire européen du sexisme et du harcèlement sexuel au travail – rapport IFOP pour la Fondation Jean Jaurès et la FEPS – 2019)

Le sexisme au travail est une réalité qui touche aussi bien les femmes que les hommes. D’un acte apparemment anodin au développement d’une situation complexe, violente et malaisante, il existe plusieurs niveaux de lecture qui peuvent chacun porter atteinte à la sécurité physique et mentale des salariés que l’employeur a pour obligation de protéger. Dans l’article suivant, découvrez un état des lieux des violences sexistes dans le monde professionnel…

1) Les comportements sexistes au travail s’inscrivent dans un cadre juridique

« Nul ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant » Article L. 1142-2-1 du Code du travail

Dans le cadre légal, les violences sexistes au travail s’expriment à travers les catégories suivantes :

  • Les agissements sexistes : ils englobent les remarques et blagues sexistes, les incivilités à l’égard d’un tiers à cause de son sexe, les préjugés sociaux culturels relatifs au sexe (« une femme doit être douce », « un homme ne peut pas pleurer »), les interpellations familières, les préjugés liés à la maternité, etc.
  • L’harcèlement sexuel : il se caractérise soit par le fait d’exercer une forme de pression dans le but d’humilier ou d’obtenir une faveur sexuelle, sans pour autant passer à l’acte ; soit par le fait d’avoir des comportements et/ou des propos répétés à caractère sexuel sans nécessairement exiger de faveurs sexuelles (et que ces propos ne soient pas désirés par le destinataire des agissements). C’est un délit pénal avec risque d’emprisonnement.
  • L’agression sexuelle : elle se définit par le fait de porter une atteinte sexuelle avec violence, contrainte, menace ou surprise sur une autre personne. C’est le « passage à l’acte » et c’est également un délit pénal avec risque d’emprisonnement.

Chaque type de violence sexuelle, aussi anodine soit-elle en apparence, est susceptible de créer un enchaînement d’actions qui porteront atteinte à la dignité et à la santé morale et/ou physique d’une personne jusqu’à se conclure par une action grave et irrémédiable du persécuteur ou de la victime. C’est pourquoi il est du devoir de l’employeur de limiter les dérives sexistes en entreprise à tous les niveaux.

2) L’employeur est tenu responsable du bien-être de ses salariés

« L’employeur prend toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel, d’y mettre un terme et de les sanctionner », Article L. 1135-5 alinéa 1 du Code du travail

L’employeur a l’obligation d’assurer la sécurité physique et mentale de ses salariés. Il est par conséquent tenu responsable si des faits de violences sexistes en entreprise sont avérés et qu’il n’a pas pris les dispositions nécessaires pour lutter contre les agissements sexistes et le harcèlement sexuel aussi bien au travail qu’en dehors du lieu et du temps de travail. Il est également tenu d’agir rapidement et efficacement pour sanctionner un cas de violence sexuelle avéré (dans un délai de deux mois).

Pour lutter contre les violences sexistes au travail, l’employeur est tenu d’agir de manière préventive en sensibilisant les salariés et a posteriori en prenant des dispositions pour enquêter et rétablir la réalité des faits. Il est tenu d’accompagner les victimes et d’appliquer des mesures disciplinaires ou légales à l’encontre du responsable des agissements quand les faits sont avérés.

L’employeur doit également prendre des mesures pour former son personnel encadrant à lutter contre les violences sexistes. Il doit nommer un référent prêt à informer et à accompagner les victimes en cas de harcèlement sexuel ou d’agissements sexistes. L’employeur doit s’assurer que la procédure de signalement de violences sexuelles au travail est facilement accessible aux salariés.

L’employeur se doit de rester neutre et impartial sans pour autant minimiser le mal-être de la victime pendant l’enquête interne ou pénale (en fonction de la gravité des faits) pour garantir un traitement équitable jusqu’à ce que les faits soient prouvés. Il doit cependant prendre des mesures pour séparer les collaborateurs en conflit sans nuire à leur activité professionnelle et rétablir un climat de travail sain (changement d’affectation, de supérieur, mise à pied, etc.).

3) Les procédures RH pour lutter contre les violences sexistes au travail

Les hommes subissent 4 fois plus de comportements hostiles à dimension sexiste dans un emploi considéré comme typiquement féminin que dans un emploi considéré comme typiquement masculin (DARES 2016, Dans quels contextes les comportements sexistes au travail sont-ils les plus fréquents ?)

Les procédures RH qui visent à lutter contre les violences sexistes au travail servent à prévenir l’émergence de situations de harcèlement et à savoir comment agir en cas de signalement d’une situation à caractère sexiste.

Le service RH informe tout d’abord les salariés sur la position de l’entreprise et la procédure à suivre en cas de violences sexistes à signaler. L’information peut être communiquée au moment de l’onboarding ou au cours d’actions de prévention organisées sur le thème des violences sexistes. Les dispositions du Code du travail relatives au harcèlement sexuel et aux agissements sexistes doivent être mentionnées dans le règlement intérieur de l’entreprise. Les salariés doivent être suffisamment sensibilisés pour pouvoir identifier les violences sexistes, savoir à qui s’adresser pour les signaler (le référent ou le représentant de la médecine du travail), connaître le régime de protection des victimes et les sanctions pénales encourues.

Le service RH peut s’adresser au Comité Social et Économique, aux services de l’inspection du travail et aux Associations Régionales pour l’Amélioration des Conditions de Travail pour organiser des actions de prévention.

Les responsables RH rédigent une procédure adaptée à son organisation interne qui facilite le signalement et les actions à mettre en place en cas de violences sexistes au travail. Cette procédure encadre par exemple, le devoir de confidentialité, le devoir d’impartialité, les conditions de réalisation des entretiens individuels (en cas d’enquête interne) et les actions à mettre en place pour séparer les collaborateurs en conflit.

Enfin, la direction des ressources humaines réalise également une évaluation des risques de violences sexistes au travail au préalable en fonction du contexte connu pour adapter sa procédure : y a-t-il des travailleurs isolés dans l’entreprise (qui se déplacent chez des clients ou des prestataires par exemple) ? Est-ce qu’il y a des personnes vulnérables (des jeunes stagiaires par exemple) ? Est-ce qu’il y a suffisamment de mixité dans les équipes ? (La domination d’un genre par rapport à l’autre favorise les agissements sexistes.)

4) Quels sont les contextes les plus exposés au sexisme au travail ?

73% des femmes qui devaient obligatoirement porter une tenue montrant leurs formes au travail ont vécu au moins une forme de violence sexiste et sexuelle au cours de leur vie professionnelle. (Observatoire européen du sexisme et du harcèlement sexuel au travail – rapport IFOP pour la Fondation Jean Jaurès et la FEPS – 2019)

Les violences sexistes se développent plus facilement dans les contextes professionnels où la mixité est faible comme dans le secteur du bâtiment où les hommes sont massivement représentés. 71% des femmes qui travaillaient dans un environnement principalement masculin ont vécu au moins une forme de violences sexistes et sexuelles au cours de leur vie professionnelle. Cependant, les violences existent dans tous les secteurs et aucune branche professionnelle n’est épargnée par ce phénomène.

D’après l’étude IFOP réalisée en 2019, l’âge, le niveau d’étude, la position hiérarchique ou les niveaux de revenu ont sensiblement peu d’incidence dans le profil des Européennes victimes de violences sexistes. En revanche, le code vestimentaire imposé par l’entreprise, quand il souligne trop la silhouette, augmente les risques de violences sexistes. Les femmes en contact avec le public exclusivement par téléphone sont également plus exposées. L’enquête IFOP est consacrée aux violences sexuelles faites aux femmes, mais les hommes sont également victimes de sexisme au travail.

Pour plus d’informations, consultez le guide pratique et juridique « Harcèlement sexuel et agissements sexistes au travail : Prévenir, agir, sanctionner » publié par le Ministère du Travail.

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Crédit photos : image de mohamed Hassan de Pixabay

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À propos de l'auteur

Dalale Belhout

Directrice au sein de la Fondation FACE (Fondation Agir Contre l'Exclusion), Dalale dirige le Club des entreprises socialement engagées de Seine-Saint-Denis et sensibilise acteurs privés et publics aux enjeux de recrutement inclusif et de diversité en entreprise. Ancienne Head of Content chez DigitalRecruiters, elle est aujourd'hui ambassadrice du Lab'DR, une communauté d'experts qui partage réflexions et bonnes pratiques sur le blog. Dalale est par ailleurs co-auteur de plusieurs ouvrages dédiés au digital appliqué aux RH, à la marque employeur et au recrutement responsable et éthique, sujets sur lesquels elle intervient régulièrement en tant que conférencière.