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Sélection des candidats : la personnalité est-elle plus importante que les diplômes ?

Selon une enquête RégionsJob 2017, 82% des recruteurs considèrent que le savoir-être est l’élément le plus important dans une candidature !…

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Selon une enquête RégionsJob 2017, 82% des recruteurs considèrent que le savoir-être est l’élément le plus important dans une candidature !

Une tendance forte est de plus en plus en vogue dans les milieux du recrutement ces derniers temps, se focaliser sur la personnalité des candidats. Ce qu’on devrait chercher avant tout chez un candidat, c’est un caractère, des qualités personnelles, cette particularité, en dehors de ses compétences qui lui est propre. Plusieurs arguments supportent le raisonnement, et certains recruteurs n’hésitent pas à se focaliser principalement sur ce critère pour sélectionner le candidat idéal.

Cette tendance est-elle raisonnable ? Pour quelles raisons devrait-on davantage faire attention à la personnalité des candidats ? Des éléments de réponse dans cet article !

Tout le monde a sa propre définition de la personnalité

« Outre le niveau de qualification et les compétences, nous cherchons avant tout des personnalités. Nous attendons des candidats ou de nos futurs collaborateurs qu’ils soient volontaires, souhaitant relever des défis, ayant une volonté d’apprendre et de progresser. Nous souhaitons également qu’ils adhèrent et partagent nos valeurs, c’est-à-dire le relationnel, la satisfaction client, la qualité de service et le professionnalisme. » Franck Raynel, Responsable recrutement du Crédit du Nord

Des tests de personnalité pour évaluer les candidats

Beaucoup de choses sont spontanément rangées dans la case « personnalité » de façon générale. On le voit bien dans la citation précédente de Franck Raynel : on parle de valeurs, de savoir-être, de qualités personnelles, parfois de motivation, ou encore de compétences comportementales. Au sens strict, la personnalité est comme une « carte d’identité psychologique », unique pour chaque individu. Pour la décrire, le modèle théorique le plus connu, et aussi celui qui fait le plus consensus au sein de la communauté scientifique est celui des « Big Five ». Résultat de plus de 50 ans de recherche et d’études sur le sujet, il comprend 5 traits principaux dans lesquels chaque individu aura des scores plus ou moins élevés en fonction de sa personnalité :

  • L’Ouverture: Les personnes ayant des scores élevés dans ce trait apprécient généralement davantage les œuvres artistiques, l’aventure, les idées non-conventionnelles, sont plus curieuses et intéressées par la nouveauté.
  • La Conscienciosité: Ces personnes ont généralement plus d’autodiscipline, aiment fonctionner avec des objectifs, respectent davantage les obligations, et sont plus organisées.
  • L’Extraversion: Les personnes ayant des scores élevés en extraversion vont chercher davantage la compagnie et le contact avec les autres, cherchent à être souvent stimulées socialement et à ressentir des émotions positives
  • Agréabilité: Ces individus sont plus compatissants et coopératifs avec les autres.
  • Neuroticisme: Ces personnes ont tendance à être plus variables dans leurs émotions, et à les ressentir plus intensément que les autres individus.

Il faut bien faire attention à la lecture de ce modèle : il ne s’agit pas de cinq catégories, mais de cinq « traits » ou cinq « axes » dans lesquels les personnes peuvent plus ou moins se reconnaître. Chaque personne est évaluée 5 fois. Une fois que la personne est située sur les cinq axes, on peut lui tracer un profil de personnalité. On évalue généralement la personnalité à l’aide de tests, souvent par auto-évaluation, et parfois avec la méthode dite du « 360° » (plusieurs personnes qui ont l’habitude de travailler avec moi m’évaluent).

Parfois, certains recruteurs désignent les compétences dites « comportementales » lorsqu’ils parlent de personnalité. Il s’agit de compétences transversales à presque tous les métiers, et qui ne nécessitent pas ou peu de savoirs techniques. On y inclut généralement le leadership, les compétences managériales, le travail en équipe, la rigueur, ou l’écoute des autres, par exemple. Pourtant, même si ces compétences ne sont pas liées à un travail en particulier, elles ne peuvent être considérées comme la personnalité du candidat, même si elles en dépendent, bien évidemment. Tout comme les compétences techniques, elles se développent tout au long de la carrière, et nécessitent des apprentissages, et de la pratique, contrairement à la personnalité.

Pourquoi la personnalité est-elle importante ?

Seuls 9% des recruteurs jugent le diplôme comme un critère « très important » !

Il est plus simple de modifier des compétences qu’une personnalité

Il y a plusieurs réponses à cette question, et encore une fois, tout dépend de ce que l’on range dans la case « personnalité ». L’argument généralement présenté pour défendre l’importance de la personnalité est le suivant : quand on recrute une personne pour un travail donné, elle pourra toujours apprendre, développer ses compétences techniques avec de la formation, ou avec l’expérience. La personnalité, elle, sera quasiment impossible à changer. Par conséquent, il vaudrait mieux faire des concessions sur la compétence technique plutôt que sur sa personnalité si l’on souhaite garder la personne au long terme.

L’autre raison majeure est que certains traits de personnalité sont préférables pour certains métiers par rapport à d’autres. On sait, par exemple, qu’il vaut mieux recruter des commerciaux qui se décrivent comme « optimistes », car ceux-ci seront moins découragés par les échecs à répétition que l’on peut rencontrer dans ce métier. Un autre exemple : pour les postes très « procéduriers », où il est nécessaire de suivre beaucoup de règles et de protocoles, les personnes se décrivant comme « consciencieuses » s’y sentiront plus à l’aise. Enfin, on sait que pour les métiers très créatifs, les personnes ayant de forts scores dans le trait « ouverture » seront plus attirées par la nouveauté, et donc auront plus de chances de trouver des idées nouvelles.

Pourtant, même si la prise en compte de la personnalité du candidat est une avancée dans le domaine du recrutement et globalement dans le monde du travail, certains discours ont tendance à exagérer la place que celle-ci occupe.

Une importance… à relativiser

Selon une enquête LinkedIn 2017, 32% des recruteurs souhaiteraient investir davantage dans des outils d’analyse des compétences humaines des candidats pour le futur !

Se fier uniquement à la personnalité du candidat est risqué

Le problème avec la personnalité, c’est que le concept est très séduisant : en faisant passer des tests, ou simplement en tentant de déceler le caractère d’un candidat en entretien, on prend vite goût au rôle de l’apprenti mentaliste. Certaines entreprises ou autres consultants ont bien compris cela, et n’hésitent pas à produire n’importe quel test, tous censés être plus révolutionnaires les uns que les autres. Le marché des tests existe bel et bien, avec de vrais enjeux économiques pour certaines sociétés.

La conséquence de cela, c’est que le discours présent au sein des ressources humaines a tendance à donner beaucoup de poids à la personnalité dans le recrutement, alors que les études montrent que son rôle dans la performance au travail reste modeste, même s’il existe réellement. A ce jour, l’évaluation des capacités d’analyse du candidat et les épreuves de simulations de situations professionnelles restent les meilleures méthodes pour prédire la capacité à occuper un poste, et il est nécessaire de rester critique face à chaque nouveau discours prétendu révolutionnaire sur la personnalité.

Le véritable enjeu de l’analyse de la personnalité dans le recrutement, c’est de lui redonner la place qu’elle mérite : ne pas en faire un critère majeur, mais ne pas l’ignorer non-plus. Concernant son évaluation, n’allez pas chercher loin : de très bons tests standardisés sont libres d’accès à ce jour, ou, au pire, peuvent être facilement construits et adaptés par un psychologue du travail. Leur utilisation, la passation et le débriefing nécessitent néanmoins un minimum de formation, pour savoir correctement analyser, décoder, et restituer les résultats avec le candidat !

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À propos de l'auteur

Dalale Belhout

Directrice au sein de la Fondation FACE (Fondation Agir Contre l'Exclusion), Dalale dirige le Club des entreprises socialement engagées de Seine-Saint-Denis et sensibilise acteurs privés et publics aux enjeux de recrutement inclusif et de diversité en entreprise. Ancienne Head of Content chez DigitalRecruiters, elle est aujourd'hui ambassadrice du Lab'DR, une communauté d'experts qui partage réflexions et bonnes pratiques sur le blog. Dalale est par ailleurs co-auteur de plusieurs ouvrages dédiés au digital appliqué aux RH, à la marque employeur et au recrutement responsable et éthique, sujets sur lesquels elle intervient régulièrement en tant que conférencière.